Dans "L'île noire", Peter May ressuscite son personnage emblématique, l'inspecteur Fin Macleod, douze ans après la fin de la trilogie écossaise. L'idée de ce quatrième tome, initialement envisagée pour un autre projet se déroulant dans l'archipel norvégien de Svalbard, a été relocalisée sur l'île de Lewis en raison des restrictions de voyage liées au Covid-19. Cette contrainte a finalement permis un retour aux sources, offrant aux lecteurs une nouvelle exploration des paysages et de la culture des Hébrides extérieures, si chers à la trilogie originale.

L'intrigue débute lorsque Fionnlagh, le fils de Fin, est accusé du meurtre d'un de ses élèves. Fin, désormais installé à Glasgow, est contraint de revenir sur son île natale pour défendre son fils et découvrir la vérité. Ce retour est l'occasion de retrouver les personnages familiers de la trilogie, mais aussi de les confronter aux changements survenus dans leurs vies au cours de ces douze années. Les relations ont évolué, et de nouvelles dynamiques se sont installées, enrichissant la profondeur psychologique des protagonistes.

Peter May intègre habilement des problématiques contemporaines et locales dans son récit. Deux éléments centraux, typiques des îles, sont mis en lumière : les fermes de saumon industrielles et les échouages massifs de baleines pilotes. L'auteur a mené des recherches approfondies sur ces sujets, révélant la face cachée de l'aquaculture intensive. Il décrit les conditions de vie épouvantables des saumons, victimes de maladies et de parasites dans des élevages qui sont devenus des multinationales polluantes. Cette critique de l'industrie agroalimentaire apporte une dimension écologique et sociale forte au roman.

Parallèlement, l'échouage des baleines pilotes, un événement tragique survenu un an avant l'écriture du livre, sert de métaphore puissante. Ces cétacés, connus pour leur forte cohésion familiale, se sacrifient les uns pour les autres en cas de détresse. Ce thème de la loyauté familiale et du sacrifice fait écho aux enjeux auxquels sont confrontés les personnages du roman, notamment Fin, prêt à tout pour son fils.

Peter May partage également ses réflexions sur son processus créatif et son avenir. À 73 ans et après plus de trente livres et une longue carrière dans le journalisme et la télévision, il considère "L'île noire" comme une potentielle dernière œuvre, bien qu'il reste ouvert à l'inspiration future. Ce roman est une parfaite fusion entre le polar haletant, la richesse des liens familiaux et une exploration critique des problématiques environnementales et sociétales, ancrée dans un cadre insulaire toujours aussi fascinant.