Dans L'enfant à la tête baissée, Alexis Salatko lève le voile sur un mal étrange et invalidant, la dépnophobie, la peur de manger en public. À travers le prisme de cette phobie méconnue, il nous plonge dans le récit intime d'une enfance marquée par cette condition et les stratégies mises en place pour y faire face.

Le roman explore non seulement le vécu du jeune héros face à cette incapacité de se nourrir devant autrui, mais aussi l'impact de cette particularité sur sa cellule familiale. Le lecteur découvre ainsi Doc, le père cardiologue établi à Cherbourg dans les années 60, et Prof, la mère, ancienne professeure de philosophie ayant renoncé à l'enseignement pour ses enfants. Ce sont deux figures centrales qui tentent d'accompagner leur fils. La figure du frère aîné, Costia, joue également un rôle protecteur essentiel.

L'auteur souligne l'importance des mots et de la lecture comme nourriture spirituelle pour compenser l'incapacité physique de se nourrir normalement. La tête baissée du personnage, conséquence de son manque de force, devient métaphoriquement la posture du lecteur, puis de l'écrivain. Sa mère, Prof, l'initie très tôt à la littérature, faisant des livres sa véritable subsistance. C'est un roman qui interroge les deux formes de nourriture : celle du corps et celle de l'esprit, et la quête d'équilibre entre les deux.

Alexis Salatko explique le choix d'écrire sur ce sujet longtemps tu, soulignant que ce n'est pas une démarche exhibitionniste, mais plutôt un moyen de reconstituer un monde disparu : celui de sa jeunesse à Cherbourg dans les années 60, 70 et 80, de ses parents, de son frère et de la "Black House", le décor de son enfance. Le déclic de l'écriture est survenu après le décès de sa mère, offrant une perspective unique pour explorer son passé et les liens familiaux à travers cette expérience douloureuse.