Contributions attestant, par le contraste et la pluralité des pratiques phénoménologiques engagées, d'une vigueur de l'adresse phénoménologique et témoignant de ce que l'inachèvement de la phénoménologie a pour tâche de révéler le mystère du monde et le mystère de la raison. Evocation d'une forme de correspondance des temps entre la phénoménologie en son possible et le monde technique. ©Electre 2025

Phénoménologie et technique(s)

Dans une époque caractérisée par une importante, et peut-être sans précédente, expansion des innovations technologiques, il semble opportun de réfléchir, au-delà de toute technophobie ou technophilie, à une correspondance possible entre quelques pratiques phénoménologiques et la technique dans la pluralité de ses expressions. Il ne s'agit pas cependant de soumettre les techniques à une quelconque doctrine phénoménologique, comme s'il s'agissait de leur imposer un ensemble de règles préconçues ou une méthode préalable d'inspection réflexive. Le geste phénoménologique, ou « post-phénoménologique », pourrait bien plutôt être essentiellement une manière de nous ouvrir au déploiement hétérogène de la technique, de mettre en question notre relation à l'instrumentalité qui intervient dans la conscience que nous avons des choses, du monde et d'autrui. Il convient surtout de nous questionner dans ce lien qui nous unit intimement aux techniques, de nous interroger sur ce qui nous arrive par elles.

Si les techniques viennent modifier la temporalité même de l'exister humain ainsi que son rapport à l'espace, nous renvoient-elles pour autant immanquablement à une volonté de puissance ? A d'éventuels risques de déshumanisation ou de déracinement ? A une ivresse de la rapidité et de la connexion permanente ? Ou bien, au contraire, ne contribuent-elles pas à enrichir notre expérience perceptive en nous donnant accès à de nouvelles modalités d'existence, en rendant visible d'invisibles dimensions de la réalité ? Abordant aussi bien la technique dans ses origines que dans ses multiples devenirs, et travaillant à articuler cette problématique essentiellement à partir des oeuvres de E. Husserl, M. Heidegger, J. Patocka, E. Lévinas, H. Jonas, J. Dewey, D. Ihde, G. Simondon, J. Derrida et B. Stiegler, les contributions rassemblées dans cet ouvrage entendent risquer une correspondance entre l'ambiguïté du phénomène de la technique et la compréhension de la phénoménologie dans ses possibilités les plus inattendues.