Essai consacré au journal que Gracchus Babeuf fit publier après le Journal de liberté de la presse, et dont l'évolution du propos valut au révolutionnaire français bon nombre de détracteurs, l'accusant de passer de la position du thermidorien à celui d'ultra-anarchiste. L'auteur, soucieux de respecter scrupuleusement le texte d'origine, tente de montrer la singularité de sa pensée. ©Electre 2025

À la différence de Robespierre, qui a l'avantage d'être haï, Babeuf est seulement méprisé. La gloire du premier contraste avec l'obscure carrière du second. À travers ses journaux, l'auteur met en lumière cet homme, plébéien par droit de naissance, sublime par vocation, martyr par obligation ; ce philosophe qui, loin de pousser à la violence armée, à la terreur, voulut conjurer la misère.

Babeuf rédigea et publia deux journaux ; successivement, le Journal de la liberté de la presse et Le Tribun du peuple, ou le défenseur des droits de l'homme. Les citations faites ici respectent exactement le texte. Le premier fut son énorme erreur, aveuglé qu'il fut par sa détestation de la tyrannie. Ce journal est le témoignage poignant de l'événement majeur, qui ruina la Révolution, et qu'une lecture mensongère falsifia. Cette erreur, qu'il répara avec Le Tribun du peuple, lui servit, comme peut être utile à un esprit qui se méconnaît, d'errer jusqu'à surmonter sa propre faiblesse. Mais cette erreur lui fut fatale pour la postérité ; elle permit à de piètres lecteurs, à des esprits forts et à des hâbleurs notoires d'affirmer que Babeuf à évolué, de thermidorien à l'ultra anarchiste. Il ne fut ni l'un ni l'autre.

Lire Babeuf n'est possible que si l'on dispose de ses écrits, non falsifiés, non tronqués, sans commentaire insidieux, et surtout sans cet a priori qu'est une lecture selon la loi et les commandements ; le marxisme le fut, le furétisme l'est, et bien pis. L'auteur ne prétend pas à la neutralité axiologique ni ne se défend de sa profonde amitié pour Babeuf : on ne peut comprendre que ceux avec qui on a en commun ; autrement, on est assuré de porter des jugements faux et fondés sur l'opinion commune.