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Un coup de coeur de Marion B.
Utopie ou expérience visionnaire ?
"Ceux auxquels l'idée de liberté est étrangère se demanderont ce qu'est cet asile de fous où les enfants jouent toute la journée s'ils le désirent. Beaucoup disent : "Si j'avais fréquenté une telle école, je n'aurais jamais rien fait." D'autres encore : "Ces enfants seront bien handicapés lorsque plus tard ils se trouveront en concurrence avec des enfants que l'on aura forcé à apprendre."
Utopie ou expérience visionnaire ?
L'école de Summerhill fondée en 1921 par A. S. Neill est peu connue dans son pays d'origine, l'Angleterre, mais a connu un succès retentissant en France un demi-siècle après sa création lors de la traduction de "Libres enfants de Summerhill" aux éditions Maspero. Les braises de Mai 68 étaient encore chaudes et ce pionnier de l'Éducation Nouvelle avait de quoi trouver un écho sur la terre d'adoption de Rousseau. Psychanalyste et éducateur, A. S. Neill a consacré sa vie à mettre en pratique une pédagogie qui prônait la liberté et la participation active des enfants à leur propre éducation à rebours des pédagogies traditionnelles. Le développement de la personne des enfants, la reconnaissance de leurs droits et de leurs voix sont en effet au cœur de cette institution fondée sur un principe d'auto-gestion démocratique réglée par le vote égalitaire des adultes comme des enfants. Une liberté démocratique qui se double encore de nos jours d'une liberté pédagogique des enseignants et des élèves: A. S. Neill a ainsi redonné son importance à des pans entiers de l'éducation, absents de l'instruction traditionnelle, telles que les activités manuelles et de plein air. Libres d'assister ou non aux cours, les enfants les plus réfractaires aux enseignements académiques, après s'être gorgés de la liberté de jouer jusqu'à la lie, reviendraient d'eux-mêmes aux enseignements classiques et se formeraient avec d'autant plus de rapidité et de réussite qu'ils le feraient avec désir, en position de sujet. De même, l'organisation de la vie quotidienne et sociale est un aspect considéré comme aussi, sinon plus important dans la construction de l'enfant que l'acquisition des connaissances requises par la société. A. S. Neill était en effet très critique de l'instruction qu'il a dénoncé en tant qu'outil au service du système politico-économique visant à former des individus dociles, adaptés à la société plutôt que des individus libres, créatifs et confiants. En ce sens, il s'est insurgé contre tout ce qu'il considérait comme des menaces pour les libertés individuelles sous la forme des modèles capitaliste comme communiste.
Si on a pu reprocher à A. S Neill une pédagogie "naïvement rousseauiste"*, la révolution opérée par le psychanalyste éducateur continue d'inspirer et de nourrir les réflexions autour de l'enfant et de l'éducation, Summerhill School accueillant toujours des élèves entre 5 et 17 ans sous la houlette de la fille de Neill, digne héritière de son père.