Un coup de coeur de Anthony G.
D’évidence, ce qui déborde d’abord de toutes les pages, c’est la beauté de la nature. Le vert du monde. Les forêts, la biodiversité foisonnante, la couleur des fleurs, la neige, les éléments. « Le O étonnant de la lune, rien que lui dans la page du ciel. » Pour conter la poésie environnante, Mélu emprunte à la langue française sa poésie intrinsèque. Les choses, les êtres et les lieux sont ainsi nommés : reine-des-près, fougère-aigle, millepertuis, Mont Repos, Froide-fontaine, Eaux-rouges, Charlebois, Petit-Colas, Méhari, etc... On admire Mélu se montrant faisant partie de ces « gens aimants qui ont un plaisir infini à trouver dans les accidents d’un paysage, dans la transparence de l’air, dans les parfums de la terre, la poésie qu’ils ont dans l’âme. » (H. de Balzac)
Mais ce récit est aussi un récit d’apprentissage. Il s’agit d’apprendre ce que la terre nous enseigne (en premier lieu, le cycle des saisons) et de prendre ce qu’elle nous donne. Ce qui nécessite parfois de se confronter à la dure réalité car, avec la poésie du monde, vient le froid glacial, les tempêtes de neige, les difficultés financières, les ressources qui viennent à manquer. Il faut composer avec l'idée que son élevage finisse à l'abbatoir et que les tronçonneuses déforestent tout autour. Il faut se satisfaire du maigre fruit de ses grands efforts. « Vivre là-haut, ce n’est pas la poésie imaginaire des citadins, c’est une méchante bagarre où il faut mettre toute sa force. »
Ces difficultés racontées sans lyrisme sont la démonstration d'une grande honnêteté et rendent le récit d'autant plus beau. Car l'on sait que l'on ne nous ment pas, que la réalité n'est ni enjolivée, ni fantasmée. Elle est là telle qu'est la vie ; dans toute sa beauté et dans toute sa rudesse. Bambois est le récit d'une « vie passée dans la familiarité des bêtes et le rythme des saisons » ; « une vie verte dont nous portons tous la nostalgie ou le désir. »