Un coup de coeur de Mollat
Le dispositif est régulièrement le même : des portraits de femmes, actrices ou chanteuses. Leur nom est noté sur le pourtour du Polaroid au crayon rouge en lettres capitales dans une écriture maladroite, parfois accompagné de série de chiffres qui semble correspondre à leurs mensurations. Parfois, il s'agit du film qui est notifié (souvent films d'action ou de science-fiction).
Le résultat, dont un échantillon nous est proposé dans ce livre, est particulièrement troublant.
Tout un défilé de clichés d'actrices ou de chanteuses figées s'offre à nos yeux : Ursula Andress, Anita Ekberg, Jane Fonda, Gina Lollobrigida, Brigitte Bardot etc… (un seul homme photographié, Sean Connery dans « Thunder Ball »).
Les modèles ne semblent pas prises dans des moments qui flatteraient leur beauté, mais comme l'indique Cindy Sherman dans la préface, les actrices se présentent souvent comme des êtres fantomatiques et/ou effrayants saisies dans des instants d'intense émotion. Le cadre de l'écran apparaît parfois, le photographe prenant le téléviseur de biais. L'aspect concave du téléviseur créant des déformations.
Feuilleter ce livre provoque un certain émoi, voir un profond malaise, les actrices apparaissant comme des poupées figées dans leur univers, marionnettes prisonnières dans leur huis clos de verre.
Quelles furent les motivations du photographe ? Pourquoi un tel systématisme, une telle obsession ? Le mystère de ce projet et de ses origines restent entier et contribuent au charme intrigant de ce magnifique petit ouvrage.
(courte préface en anglais)