Mardi-gras Descendres, le
rebelle
Le héros va devoir lever le mystère
du Purgatoire par rapport à son métier de cartographe (de son vivant). Or c'est
une chose interdite. C'est un personnage dans lequel tout le monde doit se
projeter. Il est l'un des seuls qui garde, a priori, des bribes de souvenirs de
la Terre car sa mort est récente. Il ne peut donc que réagir face à
l'incohérence de cet au-delà. C'est un peu le héros kafkaïen du
Procès.
L'humour de
Mardi-Gras
Il est nécessaire pour éviter les clichés du
genre et tomber dans le
morbide. Il fallait à mon sens plusieurs niveaux de
lecture car tomber dansle morbide qui est une impasse en soi. Mardi-Gras est
satirique pour permettre une meilleure identification du lecteur par rapport au
héros. J'arrive ainsi à créer une fable métaphysique en y glissant des
références par-ci par-là à notre monde. En même temps, j'ai voulu donner un ton
agréable et immédiatement perceptible.
Les sources
d'inspiration
Elles sont purement émotionnelles et
intuitives.
J'aime beaucoup la période expressionniste des années 20 tant au
niveau de la peinture que du cinéma. Toute la vague fantastique, même certains
dessinateurs comme Alfred Kubin (également auteur d'un roman fantastique,
L'Autre côté).
Le Purgatoire sert de miroir, de réflexion, de distance
peut-être pour dénoncer les choses d'ici-bas : ce sentiment que l'on perçoit
tous, d'être perdu à un certain moment, dépassé par les évènements, avoir un
mystère en face de soi, un monde que l'on ne comprend pas toujours. Mais on
trouve aussi dans cet au-delà une part de rêve et de fantasme.
Tout cela
vient se greffer naturellement sur des albums très différents puisque le premier
est principalement humoristique, le deuxième plus politique et le troisième plus
onirique. Quant au quatrième il sera forcément encore différent…
La dimension
mystique
Mardi-Gras Descendres est une comédie
métaphysique d'aventure qui met en avant la quête de soi, le dépassement des
difficultés, des dangers. Quand je parle d'alchimie, on est toujours autour de
ces lois de transformation, de transmutation : changer du plomb en or donc
d'espoir (il y a toujours une lumière).
Une nouvelle théorie de
l'Au-delà ?
En dédicace, beaucoup de personnes se réclament un peu
de ce que je fais. Pourtant je ne propose aucune réponse. Je fais avant tout ce
qui me plaît : faire rêver, faire peur même, voilà les réponses. C'est vrai que
l'on a tendance à fabuler ; les sectes proclament quelque chose, les religions
aussi. Moi, je pars du principe que l'on ne sait rien et c'est mon crédo pour
Mardi-Gras. J'ai essayé de tirer quelques enseignements simplement humains que
l'on trouve à notre portée et pas plus. La suite est vraiment pour
après…
Les projets
Les
corsaires d'Alcibiade, avec Filippi (dans la collection Empreintes, chez
Dupuis). Avec une ambiance Jules Verne, même si on est dans les années 1820. Un
groupe de cinq jeunes gens avec une particularité – chacun est bon dans sa
discipline. Ils sont kidnappés pour être intégrés dans une école d'élite où ils
seront formés à la recherche de trésors que financerait une organisation obscure
pour le compte de la Couronne d'Angleterre. C'est de l' aventure pur jus ! cette
fois-ci, je me laisse piloter par le scénariste. Cela est très enrichissant,
ouvre d'autres horizons.
Les dernières
lectures
Antonin Artaud : il se rapproche de ma
manière de procéder en scénario c'est-à-dire mettre en image des choses
inexprimables, de créer des images inédites, des visions extraordinaires. En BD,
les indépendants, parmi lesquels Daniel Clowes, Craig Thompson...
Monsieur Mardi-Gras
Descendres, d'Eric Liberge.
Des propos recueillis par Didier Berthélémy et Loïc Nicolas